L’histoire des matières PE pour canalisations pression est marquée par l’innovation continue des résines et des tubes.
On pense bien entendu en premier lieu à la résistance en pression, les matières PE étant graduellement passées de PE32 à PE100, donnant accès à des gammes de pression supérieures ou permettant de réduire les épaisseurs des tubes à performance égale. Le consensus actuel étant que le PE80 moyenne densité est la meilleure solution pour les petits diamètres grâce à sa plus grande flexibilité, le PE100 pour les plus gros diamètres.
Mais une autre caractéristique essentielle : la résistance à la propagation lente de fissures, à également connue une évolution non moins spectaculaire.
Si le MRS permet de dimensionner les canalisations en fonction de la pression de service, la résistance à la fissuration lente (SCG) est une indication sur la performance à long-terme des tubes et leur capacité à résister à des ruptures de type « fragile ».
Evaluée suivant l’essai normalisé NPT (Notch Pipe Test), essai sous pression à 80°C sur tube pré-entaillé, la performance des tubes est passée progressivement de quelques dizaines d’heures pour les premières générations de PE à 1000 / 3000 heures pour les PE100 actuels. Les PE100-RC repoussent cette limite bien au-delà, les temps d’essais allant jusqu’à plus de 8760 heures (un an), ouvrant la porte à de nouvelles utilisations.
Cette évolution majeure des résines PE a pu être possible grâce à l’utilisation combinée de systèmes de catalyse perfectionnés, de process de fabrications avancés et, bien souvent, par le remplacement du butène par l’Hexène comme co-monomère, ce dernier permettant de créer, à l’échelle moléculaire, des molécules de liaison beaucoup plus solides et efficaces entre les zones cristallines du PEHD, et donc de garder la structure macro moléculaire intacte même sous des contraintes importantes.
Rôle des molécules de liaison dans la structure des résines PE
En pratique, ce renforcement confère aux tubes une résistance bien supérieure aux agressions mécaniques auxquels ils peuvent être soumis au cours de leur vie. Comme par exemple la résistance aux entailles extérieures ou bien la résistance au « point dur » crée par une pierre.
Par conséquence les canalisations PE100-RC peuvent donc être installées dans des conditions bien plus agressives que les canalisations en PE100 classiques :
- Travaux sans tranchées, comme le forage dirigé, dans lesquels il existe le risque de créer des entailles sur l’extérieur du tube.
- Installations en tranchées ouvertes sans lit de sable et avec réutilisation directe des matériaux extraits pour le remblai de la tranchée ; Ce type d’installation en PE100 génère un gain de temps considérable par rapport à une installation classique, et une économie important sur le coût total d’installation : suivant le cas de figure, on a pu estimer l’économie de 20% à 50 % du coût d’installation classique, ce qui couvre très largement le prix supérieur des canalisations PE100-RC.
Au-delà de l’aspect économique, le bénéfice environnemental des canalisation en PE100 est également aussi évident : pas de camion pour amener les matériaux de remblais spécifiques vers le chantier, pas de mise en décharge des matériaux enlevés de la tranchée et inutilisables.
Il est donc logique de voir ces canalisations de nouvelle génération en PE100 et PEHD se développer très rapidement en Europe mais également dans le reste du monde. On estime qu’en Allemagne, « berceau » du PE100-RC, 20% à 30% des chantiers utilisent aujourd’hui ce type de tubes, et il est probable que le PE100-RC y prendra rapidement le pas sur le PE100 classique. En France également, on assiste à une progression régulière de l’utilisation de ces nouvelles matières.
Un élément décisif pour favoriser ce processus reste le développement de méthodes d’essais internationales fiables et reproductibles adaptées au niveau de performance de ces résines. Les essais de caractérisations de la résistance à la fissuration lente sont aujourd’hui longs et inadaptés, car développés pour des matières de générations antérieures : que ce soit le « Notch Pipe Test » selon ISO 13479 ou le « Point Load Test » développé en Allemagne par les laboratoires Hessel, les durées d’essais vont jusqu’à un an , ce qui est peu compatible avec la réalisation d’essais réguliers. Les travaux en cours menés par le groupe de travail spécifique de l’ISO semblent à ce titre prometteurs.
Dans un second temps, pour être pleinement reconnue, cette nouvelle catégorie devra être incorporée dans les normes produits existantes comme l’EN12201 et EN1555 puis ensuite intégrée dans les règlements de Marque de certification comme la Marque NF114 en France. Le PE100-RC, n’est aujourd’hui défini qu’à travers des spécifications techniques locales mais similaires comme la « PAS1075 » en Allemagne, ou comme des avis techniques délivrés par le CSTB en France.
Christophe Salles, Borealis